Le bon mot

Les bons mots d'Auguste Derrière
Les bons mots d'Auguste Derrière

Les personnes qui font appel à moi évoquent souvent d’une manière ou d’une autre la peur qu’elles ont des mots.

 

« Trop compliqué de trouver le bon mot » est l’un des arguments qui revient le plus.

 

Le mot pour plaire ?

 

Mais quel est donc ce mot qui, à la lecture, fait mouche ? C’est, bien sûr, le mot qui convient. Celui qui fait entendre à notre lecteur cette musique séduisante nous permettant de le mettre d’accord avec notre propos. Ce vo-cable qui nous relie de bonne manière à l’autre et ne produit pas cette fausse note qui l’embarque, à notre déconvenue, dans une relation critique. Qui perd sa bienveillance.

 

Il y aurait dont un mot objectivement adéquat, qu’on peut inscrire dans le marbre, propre à rester dans les annales ? En réalité, il faut bien être sincère. Le mot qui, hier encore, valait de l’or (consensus, appétence, impacter, motivation, créatif) peut devenir le point noir sur la page. On veut juste le faire sauter, ne plus le voir. Il y a, en matière de parole, un code et des modes tout autant que dans la tenue vestimentaire.

 

Il est donc souvent paralysant de trop se projeter dans la tête de votre lecteur. De même qu’en matière de relation, il vaut mieux se concentrer sur votre côté : est-ce que ce que je dis est conforme à ce que je ressens ?

 

Le mot arbitre ?

 

Nos intentions ne sont d’ailleurs pas toujours de séduire mais seulement d’exprimer, au sens de faire sortir de nous, quelque chose que nous ne pouvons plus accepter. Le mot devient une arme et/ou un bouclier. C’est la joute verbale tant redoutée. L’arbitrage du mot juste aura effectivement toute son importance si l’on veut remettre la balle au centre.

 

Dire ni plus ni moins que notre position, notre demande d’arrêt de jeu et de dialogue équitable. Les mots deviennent médiateurs et l’enjeu nous affecte. Ce n’est alors pas dans un dictionnaire que vous trouverez la bonne réponse mais au fond de vous même dans une introspection (peut-être aidée) qu’il vaudra mieux aborder avec humilité. Et plutôt des mots simples. « Et qui pour un bon mot va perdre vingt amis » écrivait Boileau ? A mesurer : l’objectif et la cible. Et là c’est plutôt un médiateur [1] qu’il faudrait rencontrer.

 

Le mot libre ?

 

Un mot (signé s’entend) est certes un engagement dès qu’il est imprimé ou posé dans un espace public (du mur des vespasiennes [2] à celui de votre site Internet) ou dans l’espace privé de quelqu’un d’autre (le pare-brise d’un inconnu, le mur facebook de votre concurrent). Il laissera des traces sur votre image. Comment accepter celle-ci dans le miroir tendu par nos interlocuteurs ? Il faut peut-être commencer par une bonne dose de légèreté au sens nietzschéen du terme. « Il est vain de peser sans cesse le pour et le contre. Se tromper de temps à autre fait partie de la condition humaine » disait-il. Faites plus confiance à votre intuition et acceptez-vous.

 

En attendant jeudi prochain où j’évoquerais le carburant premier de l’écriture, cette citation de René Char à méditer :

 

« Les mots qui vont surgir savent de nous ce que nous ignorons d’eux »

 



[1] Y’en a un très bien à découvrir dans ma page Liens

[2] On aurait plutôt envie d’écrire les chiottes ici mais le code nous l’autorise-t-il ?

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